Réacteur 2 Exposition anormale de deux intervenants
Deux intervenants appartenant à une entreprise extérieure ont été exposés à des doses anormalement élevées lors d'une opération de maintenance sur le réacteur 2 du Bugey, sans que les doses reçues sur 12 mois glissants dépassent la dose réglementaire actuellement en vigueur.
Lors d'une opération de contrôle et de remplacement de vis sur des éléments internes de cuve du réacteur, un débris métallique particulièrement irradiant, provenant d'une vis extraite, s'est glissé sur l'outillage automatique utilisé pour les opérations, qui se déroulent sous eau afin d'assurer une protection optimale des travailleurs contre les rayonnements ionisants. L'outillage doit être périodiquement sorti de l'eau pour des opérations de maintenance ou de remplacement. La particule irradiante n'a pas été détectée lors des contrôles réalisés par l'intervenant préalablement à la sortie de l'eau de l'outil. La balise de détection de la radioactivité présente sur le chantier n'a pas non plus, pour des raisons encore inconnues, détecté cette particule. Les contrôles réalisés postérieurement sur cette balise ont montré qu'elle était parfaitement opérationnelle.
A l'issue de son poste, un premier intervenant a lu sur son dosimètre électronique une valeur de 7,38 mSv. N'ayant pas entendu d'alarme, et compte tenu de la dose intégrée sur la première partie de son poste (0,02 mSv de 7h00 à 12h00), cet intervenant a cru à un dysfonctionnement de son dosimètre électronique, phénomène survenant épisodiquement sur ce type de matériel. Il a néanmoins averti sa hiérarchie ainsi que les personnes compétentes de la centrale, qui ont demandé le développement en urgence de son film dosimétrique. L'agent lui succédant sur le poste a également constaté, quelques minutes après sa première intervention sur l'outillage, que son dosimètre électronique affichait une valeur anormalement élevée (3,28 mSv pour moins d'une minute de travail à proximité de l'outillage). Il a donc décidé d'arrêter son activité, après avoir demandé d'immerger de nouveau l'outillage. Son film dosimétrique a également été développé en urgence.
Le développement des deux films dosimétriques a montré que le premier intervenant avait intégré sur cette intervention 17 mSv, le cumul dosimétrique sur douze mois glissants (référence réglementaire) s'établissant à 24,48 mSv. Le second intervenant a intégré une dose de 9,50 mSv pour cette intervention, son cumul dosimétrique pour douze mois glissants s'établissant à 16,86 mSv. L'écart entre les valeurs lues sur les dosimètres électroniques et les valeurs effectivement intégrées par les agents, lues sur les films dosimétriques, s'explique par la technologie des dosimètres électroniques, qui saturent lorsque le débit de dose est trop important (ce qui était ici le cas) et qui sous-estiment alors la dose reçue.
La limite réglementaire actuelle est fixée à 35 mSv sur douze mois glissants et sera prochainement fixée à 20 mSv sur douze mois glissants.
Le nettoyage sous eau de l'outillage a permis de retrouver une situation normale, la particule irradiante étant récupérée par des moyens approprié. Le chantier a alors pu se poursuivre dans des conditions acceptables.
Une inspection réactive a été réalisée par l'Autorité de sûreté le lendemain de cet incident, le 26 septembre 2003. Cette inspection a mis en évidence des lacunes sérieuses dans la gestion de la dosimétrie de ce chantier, qui sont toutefois sans relation avec l'exposition des deux intervenants. Il a en particulier été constaté qu'EDF et son prestataire n'ont pas cherché à modifier l'organisation du chantier alors que le débit de dose ambiant était deux fois supérieur à celui pris en compte lors de l'évaluation dosimétrique prévisionnelle. L'ASN considère qu'une nouvelle analyse du poste de travail aurait dû être conduite et que dans les circonstances particulières de ce chantier les choix initialement opérés auraient pu être remis en question dans un objectif d'optimisation des doses, en particulier ceux relatifs au "stationnement" du personnel près de la piscine du réacteur. Cette lacune est essentiellement imputable à EDF, qui n'a pas réagi de manière appropriée aux informations pertinentes qui lui avaient été transmises, oralement et par écrit, par le chef de chantier dès le deuxième jour du chantier. La seule action engagée a consisté à rechercher l'origine de l'élévation du débit de dose ambiant et à tenter, sans succès, de le ramener aux valeurs initialement prévues.
Les inspecteurs ont par ailleurs regretté qu'EDF ait autorisé la reprise du chantier après avoir éliminé la pièce irradiante sans que les circonstances ayant conduit à l'absence de fonctionnement de la balise de chantier aient été clairement élucidées et sans qu'aucune autre action préventive ait été mise en place (des contrôles complémentaires de l'outillage avant sa sortie de l'eau ont été mis en oeuvre le 26 septembre après-midi alors que le chantier avait repris dans la nuit du 25 au 26 septembre).
Compte tenu de la dose significative reçue par l'un des intervenants, cet événement a été classé au niveau 1 de l'échelle INES.
Date de la dernière mise à jour : 03/09/2021
Classement de l’incident (INES)
Niveau 1
Anomalie