Projet d’avis relatif au dossier d’options de sûreté de l’installation de stockage de déchets radioactifs Cigéo
14/09/2017 09:09
Avis sur les risques de Cigéo en lien avec sa conception
Préambule
Il est à rappeler en préambule que la sûreté d’une installation s’établit principalement lors de sa conception, d’autant plus pour une exploitation qui a pour vocation à durer plus d’un siècle.
C’est pourquoi les questions soulevées par l’IRSN concernant la conception de ce projet doivent être considérées avec la plus grande importance ; il est en effet inutile de penser que des mesures correctives prises en cours de réalisation, voire même à l’issue d’une période dite ‘pilote’ d’observation, sauraient répondre à ces exigences de sécurité.
Rappel de la conception de Cigéo
L’objectif consiste à stocker dans le sous-sol des déchets dont le volume total conditionné avait été estimé, en ce qui concerne les colis de type Moyenne Activité Vie Longue, de l’ordre de 350 000 m3 en colis conditionnés (Andra, 2013), ré-estimés par le dernier inventaire à environ 400 000 m3 (Programme de Gestion Industriel des Déchets, version D), volume auquel il semble nécessaire de rajouter environ 104 000 m3 pour les déchets dits ’de réserve’.
Il apparaît alors assez logique, pour stocker de tels volumes à environ 500 m de profondeur, de vouloir réduire au maximum ces derniers en raison du coût unitaire très élevé du volume de stockage souterrain, et de s’inspirer de systèmes logistiques de stockage ou d’entreposage similaires à ceux que l’on peut trouver en surface.
Ces deux principes ont alors amené l’Andra a choisir délibérément des alvéoles conçues pour des colis irradiants (non dotés de protection radiologique pour ces questions d’optimisation de volume), et des espaces de stockages importants afin de pouvoir optimiser le travail des engins de manutention automatiques et radioguidés (présence humaine impossible dans les alvéoles) ; ces engins (pont gerbeur, transbordeur ..) également très coûteux unitairement, obligeant en conséquence à limiter le nombre de ces espaces (alvéoles) et à en augmenter leur volume.
Ces deux décisions, logiques sur un plan industriel, sont malheureusement fatales sur le plan de la sécurité, en effet, ces choix induisent immanquablement une impossibilité à pouvoir pénétrer dans une alvéole à partir de l’introduction du premier colis, éliminant ainsi toutes possibilités d’effectuer la moindre action corrective de maintenance, et c’est bien ce qui est rappelé par l’IRSN.
En effet, il est aisé de comprendre alors qu’il sera extrêmement difficile, suite aux dégradations attendues et prévisibles des structures, de remplacer des capteurs, de réparer les systèmes de ventilation ou de manutention ou encore de pouvoir redresser des colis. Par exemple, en cas de non-conformité d’un colis (production trop forte d’hydrogène, gonflement trop important d’un colis bitumineux, scellement défectueux ou corrosion trop importante…), il sera quasi impossible d’intervenir pour corriger ces incidents, une fois ces colis introduits dans le stockage.
Des risques d’explosions et d’incendie permanents
Explosions. Ces incidents seront omniprésents dans une alvéole en raison du nombre très élevé de colis avec une telle conception (un nombre très élevé multiplié par une probabilité relativement faible induit alors une occurrence quasi certaine de réalisation), et en particulier les risques d’explosion en raison de la génération continue d’hydrogène. En effet, on peut rappeler qu’en cas de dépassement de plus de 4% d’hydrogène dans tout espace qui ne serait pas correctement ventilé (alvéole, galerie, hotte, colis), la moindre étincelle, qui pourrait être issue par exemple, d’une batterie défaillante et non étanche, d’un éclairage cassé, d’huile sur un moteur trop chaud, voire même des systèmes de contrôles et de surveillance eux-mêmes ou encore de frictions, peut produire une explosion, et c’est bien ce que note l’IRSN, avec le rappel « des délais d’atteinte d‘une concentration de 75% de la LIE (Limite Inférieure d’Explosivité) de 2 à 5 semaines selon le type de colis (100 litres à 40 litres/colis/an) dans l’installation souterraine », ayant pour conséquence une nécessaire ventilation continue et indispensable sur une durée séculaire d’exploitation.
Mais comment penser qu’il ne puisse pas se produire une seule interruption de quelques semaines de cette ventilation dans tout espace du stockage en lien avec un éboulement, une arrivée d’eau ou encore le moindre défaut d’alimentation électrique ?
Comment dans un tel projet, avec tous ces véhicules, ces engins de manutention, les éclairages, et tous ces systèmes de radioguidage, éviter la moindre étincelle fatale en présence de l'hydrogène omniprésent, une accumulation dans des parties non ventilées s’avérant toujours possible.
Et ceci est bien corroboré par les techniciens de l’Andra : « les délais disponibles pour rétablir la ventilation en cas d’un arrêt de ventilation avant d’atteindre le critère de 1% d’hydrogène dans l’alvéole … pour une alvéole de colis B4.1 relâchant 100l/fût/an … abaissent le délai disponible à une valeur inférieure à 6 jours » 1 – Il est à noter par ailleurs que « Le taux d’émission de ces gaz explosifs (H2, CH4) libérés par certains colis de déchets B, pour des colis primaires B5.1 est de : 500 litres/fût/an (en valeur maximale, minorité de fûts) »2.
Et les colis seraient alors bien endommagés, en effet l’Andra ne nie pas qu’ « Une explosion pourrait entraîner la perte d’une fonction de confinement »3. La perte d’une fonction de confinement voulant bien entendu dire un relâchement potentiel de radionucléides dans les installations. On peut lire également « Les conséquences potentielles d’une explosion sont des blessures du personnel, l’endommagement ou la destruction de matériels et d’équipements (notamment l’endommagement d’une barrière de confinement ou d’une barrière de protections radiologiques conduisant à un risque de dissémination et/ou d’exposition externe).»4.
Et alors, les recommandations de l’IRSN se font plus précises, en mentionnant qu’il « appartiendra à l’Andra d’évaluer les conséquences d’une explosion et, le cas échéant, de présenter les dispositions de surveillance, de prévention, de limitation des conséquences et/ou d’intervention retenues ».
Incendie. Les risques d’incendie sont sans doute les risques les plus graves par la présence concomitante dans une alvéole MAVL de l’hydrogène, de colis inflammables (de l’ordre de 10 000 tonnes de bitume pur au total, soit de l’ordre de 100 à 500 tonnes par alvéole), et cette forte ventilation obligatoire (plusieurs centaines de m³/s au total dans le stockage) pour justement évacuer l’hydrogène et les gaz radioactifs.
La maîtrise d’un incendie dans un tel environnement souterrain serait particulièrement délicate à gérer :
. En premier lieu par le temps nécessaire à sa détection (265 km d’ouvrages souterrains),
. Par les difficultés d’accès des pompiers (alvéoles irradiantes et équipement nécessaire de protection aux risques radiologiques très lourd et très difficile à supporter),
. La gestion difficile de l’importante ventilation (arrêt nécessaire, progressif, mais colmatage de filtres, présence de clapets anti-retour, mais aussi extraction nécessaire des fumées).
. L’utilisation restreinte de l’eau en raison du milieu souterrain et argileux, et pour ne pas augmenter la criticité potentielle de certains colis (effet miroir pour les neutrons).
Cette vulnérabilité du stockage en cas d’incendie avec des risques d’embrasement complet d’une alvéole est bien réelle comme le démontre l’IRSN avec ses études de simulation de la propagation d’une onde thermique d’un colis source d’un foyer à un colis cible en quelques heures seulement.
Mais il est également démontré que lors de la combustion d’un simple colis bitumeux (200 kg), 20% seulement des suies produites seraient susceptibles de colmater en 20 minutes le filtre de l’alvéole considérée avec un effet éventuel de retour d’air alors contaminé vers les galeries.
Il est à rappeler que l’examen de l’inventaire des colis contenant une matrice bitume approche 9 700 tonnes de bitume pur dans l’ensemble des 50 alvéoles tel que prévu dans le chiffrage 2014 de l’Andra.
C’est bien ce qui conduit l’IRSN à « recommander des évolutions de conception majeures des alvéoles MAVL dans le cas où ces déchets seraient stockés en l’état. »
Délais d’intervention. Il est alors difficile de croire que l’on pourrait en quelques heures, dans cette centaine de kilomètres de galeries et/ou d’alvéoles, détecter un foyer débutant, contenir le feu, évacuer le personnel, faire venir les secours, arrêter la ventilation, et maîtriser le feu… avant que les structures ne se dégradent.
En effet, ici encore, l’IRSN estime que « les dispositions de détection et d’extinction ne sont pas suffisantes dans la partie utile de l’alvéole MAVL dans la mesure où elles ne permettent pas de garantir la maîtrise d’un incendie dans le délai de l’ordre de l’heure, en cas de défaillance des systèmes.».
Concernant le personnel et la structure porteuse des installation, nous sommes toujours dans des durées extrêmement courtes de pertes du stockage, voire de pertes humaines quand l’Andra écrivait en 2005 : « la structure porteuse des installations du fond est conçue pour rester stable au feu 2 heures »5, et qu’« on ne peut exclure à ce stade que les personnes pourraient être rejointes par les fumées et devraient utiliser leurs protections respiratoires et oculaires individuelles … Des personnes pourraient se trouver prises entre l’incendie et l’extrémité de la galerie sans pouvoir rejoindre une recoupe pour évacuer »6….
Perte de l’exploitation. Ensuite, et cela découle des constats précédents, il serait impossible de reprendre une exploitation ‘normale’ de l’installation après un tel accident. Cigéo, par conception, ne peut pas fonctionner avec des alvéoles ou des galeries contaminées en raison de la nécessaire ventilation ; en effet, ces contaminations seraient directement évacuées dans l’environnement. Ceci est encore souligné par l’IRSN qui « regrette qu’aucune disposition particulière ne soit étudiée par l’Andra au stade du DOS (Dossier des Options de Sûreté) pour favoriser la reprise d’exploitation après un accident. », que l’Andra « ne présente pas de moyen qui lui permettrait d’intervenir sur un désordre constaté. ». On comprend, par voie de conséquence, que le principe de réversibilité ne pourrait pas s’appliquer dans ces conditions, avec de fait, une impossibilité de continuer l’exploitation, et par conséquent bien entendu de pouvoir récupérer des colis endommagés.
Cette difficulté de réparation en lien avec la question de l’hydrogène n’est pas niée par les techniciens de l’Andra, et cela reste bien compréhensible : « les délais pour réaliser une intervention importante dans un milieu confiné difficile d’accès sont à estimer pour différents scénarios dégradés afin d’être en mesure de se prononcer sur leur compatibilité avec la maîtrise du risque d’explosion »7.
Enseignements
Conception. Il est maintenant aisé de comprendre que la conception de Cigéo soit remise en cause par l’IRSN, en effet, comment exploiter une structure logistique sous la menace constante d’une explosion et, ou d’un incendie. Il suffit qu’il existe un colis avec un défaut ou une évolution négative d’un colis, et le stockage est en danger dans cet environnement extrêmement sensible à toute divergence, sans qu’il soit possible ni de les détecter, ni même de corriger ou de remédier à ces incidents.
Et l’équipe nouvelle de 2015, après les départs de Marie Claude Dupuis (ancienne Directrice Générale) et de Fabrice Boissier (ancien directeur à la maîtrise des risques) en 2014, accentue encore ces erreurs de conception ; en effet, pour diminuer les coûts, il est envisagé d’ augmenter la taille des alvéoles MAVL de 400-450 m à plus de 500 m de longueur, avec des diamètres qui passeraient de 9 m à 12 m ou encore de rallonger les longueurs des alvéoles HAVL de 80 m à 130 m, c’est tout simplement ne pas appréhender réellement la sensibilité du projet à ces risques de conception et de structure de Cigéo.
Consensus. Il est également assez frappant de constater que rien dans les faits et les constats n’oppose les écrits techniques de l’Andra issus des dossiers de 2005 et de 2009 et les observations de l’IRSN en 2017.
En réalité, il est maintenant seulement nécessaire d’interpréter correctement et complètement ces problèmes bien identifiés dès 2005 par l’Andra.
Cette interprétation et surtout ses conséquences vont nécessiter du courage politique dans tous les sens du terme ; mais de nombreux projets similaires ont déjà été arrêtés à l’étranger. On peut citer tout particulièrement le courage du président Obama aux Etats-Unis qui a stoppé le projet ‘Yucca Mountain’ en avril 2011, dont les études avaient déjà mobilisé un investissement de plus de 9 Milliards de $, mais ce sont également le site de Pinawa au Canada, fermé en 2005 suite à l’opposition de la population locale ou encore les sites anglais, suisses ou australiens, remis en cause par l’opposition des riverains.
Alternatives. D’autres alternatives existent déjà contrairement à l’exploitation de ce type de stockage souterrain, comme des solutions d’entreposage à sec, en cours aux Etats-Unis et en Allemagne actuellement ; et d’ailleurs, AREVA propose des solutions d’entreposage à sec aux Etats-Unis via sa filiale Columbiana High Tech à proximité des sites de production (système NUHOMS), et par ailleurs les systèmes CASTOR sont également une alternative de ce type stockage en Allemagne après le désastre de Asse (mine de sel de Asse en Basse-Saxe en Allemagne qui a servi de stockage de déchets en 1995 à 2004, et qui doit s’arrêter en 2007 suite à des entrées d’eau).
Il est écrit maintenant par les acteurs principaux de la filière que le projet Cigéo, conceptuellement et structurellement, ne pourra pas permettre d’arriver à une quelconque sécurité, le pragmatisme et le bon sens obligent par conséquent à revenir vers les conclusions du débat public de 2005 qui préconisaient une solution d’entreposage pérenne de quelques centaines d’années sur les lieux de production pour refroidissement, pour dégazage, et surtout pour laisser le temps nécessaire aux études et aux recherches complémentaires, face à cette délicate problématique.
ANNEXE : Estimation des volumes d’hydrogène produits dans Cigéo
En présence de radioactivité et en particulier, en cas de forts rayonnements, les molécules d’eau sont cassées en deux radicaux : H+ et OH- qui vont pouvoir ensuite se recombiner au hasard en différentes molécules comme en hydrogène gazeux (H2), en eau oxygénée (H2O2) … pour former ainsi des composés très oxydants et très réducteurs ; tous ces composés vont ensuite être amenés à attaquer très fortement les métaux, qui par réaction, vont également produire de l’hydrogène gazeux (H2) lors de cette intense corrosion. Il est ainsi estimé que le volume d’hydrogène produit par alvéole serait de 330 m3 au total par alvéole HA, et 1400 à 5000 m3 au total par alvéole MAVL8 ; et par conséquent, en considérant une production de moitié sur les 4500 premières années8, cela entraîne un volume d’environ :
. 3000 m3 par an pour les alvéoles HA [330 m3 / 2 / 4500 ans * 50 (5 MPa à 0,1 MPa, équivalent à la pression atmosphérique) * 1500 alvéoles], et de
. 1000 m3 par an pour les alvéoles MAVL [3200 m3 / 2 / 4500 ans * 50 (5 MPa à 0,1 MPa, équivalent à la pression atmosphérique) * 50 alvéoles], toujours à pression atmosphérique.
. 1000 m3 par an sont à ajouter dans alvéoles MAVL [980 600 l / an, selon l’inventaire de la production par type de colis en litres et par an * nombre de colis], toujours à pression atmosphérique.
Références
Sauf indication contraire, les références ci-dessous sont relatives aux documents publiés par l’ANDRA sur www.cigeo.com/documents, rubriques « Dossier 2005 », « Etape 2009 » et « Evaluation des coûts 2014 ».
1 : Etape 2009 : Sûreté, p. 228, 227
2 : Dossier 2005 : Architecture, p.456
3 : Etape 2009 : Sûreté, p. 147
4 : Etape 2009 : Sûreté, p. 143
5 : Etape 2009 : Sûreté, p. 234
6 : Dossier 2005 : Architecture, p. 465, 466
7 : Etape 2009 : Sûreté, p. 227
8 : Dossier 2005 : Evolution, p. 209 & 210
13/09/2017 18:09
C'est la seule solution à l'heure actuelle, elle est sûre et l'instruction a été irréprochable
Sur le fond, je suis persuadé que le choix d'un stockage profond des déchets de HAVL dans des couches stables (argile) est la meilleure des solutions. Tout du moins pour les déchets existants et ceux des décennies à venir. Au delà, si le nucléaire civil continue à faire des progrès technologiques et même s'il produit encore des déchets, on peut espérer que les progrès dans le domaine de la transmutation permettront de mettre au point des procédés diminuant fortement la nocivité et le volume de ces déchets.
Il est vrai qu'évoquer un stockage de déchets dont la durée de vie se mesure en centaines de milliers d'années peut faire peur à certains de nos concitoyens, car on ne peut savoir quel sera l'état de notre planète et des régimes politiques qui en auront la charge à si longue échéance. Mais le fait que la stabilité du sous-sol de Bures est garantie pour des millions d'années permet d'affirmer que même si CIGEO n'est plus géré à ces temps lointains, la nature garantira que le niveau de radioactivité aura suffisamment décru pour que le risque d'irradiation soit quasi nul. La preuve de ce concept a été apportée par la découverte des réacteurs naturels d'Oklo, toujours confinés après 2 milliards d'années !
Sur la forme, le dossier a été instruit de manière remarquable, malgré l'opposition forcenée de certains groupuscules antinucléaires dont les méthodes ne relèvent pas de la démocratie. Les études préliminaires du labo de Bures apportent une garantie de sérieux sans équivalent à ce projet. Et l'ANDRA a fait l'objet d'une surveillance de l'IRSN et de l'ASN, ainsi que de la commission de gestion des déchets radioactifs. Les derniers points techniques soulevés concernant le risque incendie avec des colis bitumineux seront probablement prochainement résolus, et les solutions validées par l'ASN.
Au final, je suis favorable au projet CIGEO.
13/09/2017 16:09
Contribution de France Nature Environnement à la consultation
CIGEO : un projet pour des centaines, des milliers, des millions d'années ! L'enfouissement de 98% de toute la radioactivité produite en France depuis le début de l'électronucléaire ! Ce projet hors normes nécessite une vision large de très long terme et une rigueur absolue dans les prises de décisions. Or c'est justement le contraire qui s'est produit depuis le début. Il existe une tentation forte de bousculer les calendriers, de foncer juridiquement et politiquement sans vouloir regarder les questions de sécurité.
Sur le plan technique, tout a été dit, toutes les questions ont été posées et beaucoup l'ont été par des associatifs qui ont pris le temps de « décortiquer » un dossier énorme... et pourtant très incomplet, mettant en exergue les risques d'incendie, d'explosion, les problèmes de fermeture, la géothermie occultée...
Nous n'entrerons pas ici dans une logique d’argumentation technique point par point, mais nous allons axer cette contribution autour de trois axes :
- l'erreur fondamentale du concept même d'enfouissement en grande profondeur ;
- les dérives progressives du projet qui accroissent les risques ;
- les propositions de FNE.
13/09/2017 16:09
L'erreur fondamentale du projet
Enfouir en grande profondeur les déchets qui dérangent est une tentation forte de tout exploitant, à condition que ce ne soit pas trop cher. On les enfouit, on les oublie. C'est vrai dans tous les pays. Pour le nucléaire, on avait trouvé « une bonne solution », jeter les fûts de déchets à la mer. Finalement, devant l’évidence que l'eau de mer allait corroder le contenant et que le milieu marin serait pollué, cette pratique a été arrêtée. D'autres projets ont émergé, comme celui de les envoyer dans l'espace. Le risque d'accident de retour sur Terre étant trop important, cette option a également été abandonnée. Impossible dans l'eau, impossible dans l'air, restait la Terre. Ce projet CIGEO est en réalité la suite de ces projets avortés et il est urgent qu'il avorte lui aussi.
Enfouir des déchets inertes est déjà un défi. Il faut qu'il n'y ait aucun incident durant tout le chargement des déchets et jusqu'à la fermeture. Il faut aussi que de l'eau ne s'infiltre pas au cours du temps. Il suffit de voir le risque de pollution de la nappe phréatique d’Alsace par le stockage abandonné de déchets chimiques de Stocamine ou encore les fûts de déchets nucléaires qui barbotent dans l'eau de la mine de Asse, en Allemagne. Enfin, parmi les risques liés à l’enfouissement, impossible d’oublier le grand frère de CIGEO aux USA, WIPP, toujours à l’arrêt après un incendie et un dégagement de produits radioactifs.
Les déchets enfouis entraînent par ailleurs de nombreux impératifs techniques en raison notamment de la chaleur et de l’hydrogène qu’ils dégagent. Ainsi, le système est dépendant d’une ventilation permanente sensée durer au moins 150 ans ! Et jusqu’à quand ? Malgré les systèmes de secours, il est raisonnable d’envisager qu’il se produira à terme un incident et un arrêt forcé de ventilation … laissant le système livré à lui-même.
En conclusion, le concept même d’enfouissement souterrain est à abandonner, indépendamment de toutes les études qui seraient nécessaires pour répondre aux questions de sécurité.
13/09/2017 16:09
Quelques rappels
Pour rappel, la loi de 1991 :
- a créé l'ANDRA pour s'occuper de la gestion des déchets nucléaires ;
- a instauré pour les déchets de haute activité et à vie longue trois axes de recherches : enfouissement en grande profondeur, entreposage pérenne et séparation-transmutation ;
- a demandé la création de plusieurs laboratoires afin de tester les différents types de roches. Cela permettait aussi d'affirmer aux citoyens que le site le plus adapté et le plus sûr serait retenu. L'idée était de faire 3 laboratoires souterrains.
- Il y a donc eu en 1997 trois enquêtes publiques pour 3 laboratoires souterrains. Mais les élus n'avaient pas prévu l'opposition forte des populations. Finalement, seul un site a vu le jour, ni le meilleur, ni le pire, simplement le moins peuplé. Cela représentait un avantage pour l'ANDRA en réduisant les coûts. En conséquence, il n'était plus question de savoir si le site était bon ou pas, c'était le seul, il serait déclaré « bon pour le service ».
13/09/2017 16:09
Dérives 1 à 3
Première dérive : un seul site d'enfouissement testé, contre 3 au moins prévus. Les habitants de la région de Bure ont de bonnes raisons de se sentir floués. Quand ils ont découverts les ressources en géothermie de leur sous-sol, il était trop tard, puisqu'il n'y avait qu'un seul site.
Seconde dérive : les déchets à enfouir. Dans la loi et durant les enquêtes publiques, il n'est question que des déchets hautement radioactifs à vie longue, ceux qui représentent 96% de la radioactivité de tous les déchets, mais seulement 0,2% du volume. Des déchets très dangereux donc, mais en petit volume. Durant ces enquêtes, on avait pu montrer que 28m3 de ces déchets à enfouir contenaient une quantité de radioactivité équivalente à celle qui s'était échappée de Tchernobyl. Progressivement, les déchets moyennement radioactifs à vie longue qu'on ne savait pas où mettre ont rejoint le projet. En volume, ils représentent entre 15 et 20 fois les déchets hautement radioactifs, ce qui modifie radicalement la conception même du site et multiplie considérablement les risques (par exemple, les risques d'incendie proviennent essentiellement de ces nouveaux déchets).
Troisième dérive : tout pour l'enfouissement. Les recherches sur l'enfouissement ont été fortement soutenues au détriment des autres axes et, en particulier, de l'entreposage pérenne.
Le débat public de la CNDP de 2005 sur la gestion des déchets nucléaires s’est intéressé essentiellement aux déchets de haute activité à vie longue. Il a fait émerger une solution d'entreposage pérenne capable de durer une centaine d'années. Cette option avait pour avantage de laisser un temps réel à la réflexion en fonction de l'évolution des politiques énergétiques (poursuite ou arrêt du nucléaire notamment). Cette solution a été considérée comme intéressante par nombre de participants au débat.
Puis, la loi de 2006 a entièrement fait table rase du débat. Au contraire, elle s’est basée sur les premières recherches déjà menées pour décider que l'enfouissement serait la solution et que Bure serait le site retenu. Une seule nuance, pour convaincre les députés de voter, il a été précisé que l'enfouissement serait réversible et que les députés seraient invités à définir le terme. Evidemment, cela s’est avéré être une arnaque, puisque personne ne voit ce que cela veut dire, mais le vote a été acquis.
13/09/2017 16:09
Dérives 4 à 6
Quatrième dérive : le débat de 2005 n'a servi à rien, bien qu'il ait été de grande qualité. C'est hélas souvent le cas. La loi a ici acté des dérives successives intervenues auparavant. La méthode de gestion (l'enfouissement) et le lieu (Bure) étaient de fait déjà actés. En conséquence, l'ANDRA n’a fait qu’accélérer le dossier pour pouvoir tenir les délais.
Enfin, le débat public de 2013 a été scandaleux du début à la fin, contrairement à celui de 2005. Il signe une série de dérives incroyables. FNE, pourtant partisane du débat public, a fini par le boycotter officiellement aux côtés de presque toutes les associations locales. Il était apparu que l'Etat voulait cet enfouissement, envers et contre tous, et que le débat était proprement indigent.
Cinquième dérive : ce débat se tient en même temps que le débat sur la politique énergétique de la France qui mobilise toutes les associations. Une demande a été faite à l'ANDRA de bien vouloir décaler le débat de 6 mois. Le refus semble signaler que la participation du public n'était pas au cœur du sujet pour l'ANDRA.
Sixième dérive : le dossier est notoirement incomplet. Normalement, pour tout dossier de cette envergure hors-nucléaire, la CNDP aurait demandé des compléments. Ce dossier n'aurait pas dû passer en débat public en l'état.
13/09/2017 16:09
Dérives 7 à 10
Septième dérive : au fur à mesure du temps, ce « trou » a été destiné à recevoir les déchets de haute activité, puis de moyenne activité, puis enfin tout ce qu'on ne sait pas mettre ailleurs. Ainsi, il est prévu dans le projet CIGEO, un « volume en réserve » pour enfouir encore quantités de déchets inconnus.
Huitième dérive : les incertitudes sur les natures et les quantités des colis enfouis limite l'étude de risques qui reste sommaire. En particulier, le stockage des fûts bitumineux est associé à des risques d'incendie mal maitrisés.
Neuvième dérive : pas d'évaluation du coût du projet ! Il semble inconcevable que la CNDP ait accepté de démarrer le débat sans élément sur le coût du projet qui avoisinerait les dizaines de milliards. Le débat qui a été programmé sur ce sujet a tourné court vu qu'il n'y avait rien à débattre.
Pour finir, la loi du 25 juillet 2016 signe une dixième dérive, des parlementaires n’ont pas attendu les divers avis nécessaires pour délibérer sur la réversibilité de CIGEO (avis ASN, CNE, OPECST). Au cours de la préparation de la loi énergie, ils vont tenter à 14 reprises de placer un amendement sur la réversibilité. Comme ils n'y parviennent pas, court-circuitant le gouvernement, ils vont décider d'une proposition de loi. Celle-ci sera adoptée en moins de 3 mois grâce à l'aide du gouvernement qui l'inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée Nationale. La réversibilité n'est plus définie qu'à minima. Les colis devront rester récupérables pendant la phase pilote. Après, le site devient irréversible.
Cette énumération démontre, sans être exhaustive, le nombre d'irrégularités constatées qui est incroyable pour un projet de cette ampleur. Ces irrégularités justifient toutes les actions et protestations des citoyens contre ce projet.
13/09/2017 16:09
Les propositions de France Nature Environnement
- L'abandon pur et simple du projet d'enfouissement en grande profondeur.
- La reprise des recherches sur l'entreposage pérenne en sub-surface tel qu'il a émergé du débat de 2005 et avec un niveau de financement analogue à celui dont a bénéficié l’enfouissement.
- Et bien sûr, la sortie programmée du nucléaire, indispensable pour connaitre réellement la quantité de déchets à traiter.
13/09/2017 14:09
NON projet cigeo
En lisant juste l'avis GP, je descelle déjà des soucis et je ne sais pas lire entre les lignes.
20% des stocks inconnus, donc pour prévoir les risques , j'aimerai bien connaître comment ils font .
De plus les bitumes ne sont pas préconisés au stockage souterrain mais représentent 18% du stock prévus !!
C'est à marcher sur la tête, c'est dangereux, ça nous pose beaucoup d'interrogation pour garantir la sûreté déjà en surface, mais on cherche quand même à enfouir ! Loin des yeux, loin de quoi déjà ? De la mémoire de chacun , et comme cela nous pouvons continuer à produire de ce qui nous pose problème mais qui "nous" enrichit. Il serait important d'informer, d'expliquer le risques aux populations qui vont vivre sous ces bombes potentielles et peut-être accessoirement de leur demander leur avis, êtes vous sûr qu'ils seront satisfaits ?
De plus, on parle de surchauffe au risque électrique, mais les fissures, glissements de terrains, infiltration des eaux de pluie ou d'inondation, enfin les risques de catastrophe naturelle sont-ils envisagés, car une fois fermé, comment fait -on pour vérifier....
Donc, non, si l'on me demande mon avis, je ne suis pas favorable à enfouir ces déchets dangereux et je ne suis pas favorable à EPR non plus qui va produire des déchets encore plus problématique !!!
13/09/2017 12:09
Projet CIGEO
Absolument contre ce projet. Enfouir et laisser les conséquences aux générations futures me parait complétement irresponsable !!! Il faut arréter avec le nucléaire un point c'est tout !!!!
13/09/2017 11:09
Le stockage des déchets radioactifs doit faire l'objet d'une remise à plat, Cigeo doit être abandonné en tant que tel.
Tout un panel d'experts s'est penché sur le dossier de l'enfouissement en profondeur des déchets radioactifs à vie longue et de haute activité (autrement dit des poisons créés par l'industrie nucléaire - ça n'existait pas sur Terre avant - et dont le potentiel de nocivité dépasse l'entendement : il y a de quoi transformer durablement la planète en enfer radioactif - et encore : le plutonium, qui n'est pas encore considéré comme un déchet ne fait sans doute pas partie de l'inventaire).
Et maintenant on consulte le public pour avoir son avis. Mais quand on a, par le passé, consulté le public sur la gestion des déchets radioactifs, le public a demandé à ce que d'autres solutions que l'enfouissement profond soient étudiées. Or c'est la seule option légalement retenue, sans qu'aucune autre n'ait été étudiée. Pourtant à la lecture des documents présentés par l'ANDRA et l'IRSN (sans parler des avis émanant de la société civile dont il n'est pas fait mention ici), on voit bien que le projet de stockage en profondeur de déchets radioactifs chauds et instables, inflammables et produisant des gazs explosifs, est une aberration sur le plan de la maitrise des risques.
De deux choses l'une : soit les experts et les politiques ont seuls voix au chapitre, et ce n'est pas la peine de consulter le public, soit les experts et les politiques sont faillibles et il faut suivre l'avis premier du public : envisager d'autres options ! En effet, il y a déjà eu suffisamment d'accidents graves avec des déchets non inertes enterrés plus ou moins profondément sous terre pour que le bon sens commande de ne pas enfouir de telles bombes à retardement. D'une part il me semble que les déchets instables ne doivent pas être rassemblés en grande quantité en un même endroit, afin que s'il y a un incident il ait une gravité moindre, et afin que les rejets radioactifs dans l'environnement (inévitables apparemment) soient le moins intenses possible. D'autre part, ces déchets ne doivent pas être placés dans des endroits difficiles d'accès, où les secours et les équipes techniques ne peuvent pas intervenir rapidement en cas de problème. Bien sûr il faut aussi que ces matières extrêmement dangereuses soient protégées des risques de terrorisme ou de vol, c'est pourquoi, pour l'instant, la meilleure option semble être de sécuriser au mieux (études à réaliser) des petites quantités de ces déchets. Il se peut que certains déchets radioactifs à vie plus ou moins longue puissent être enterrés en profondeur, car ne générant pas les mêmes défis en matière de sûreté. Il se peut que les stériles radioactifs des mines (qui ont été abandonnés aux alentours des anciennes mines d'uranium et posent des problèmes de contamination de l'environnement), ou des déchets techniques, par exemple, puissent être enfouis avec profit pour la sûreté de la vie en surface.
Je pense donc que le projet Cigeo ne peut être considéré comme "ayant atteint une maturité technologique suffisante" et que l'inventaire des déchets stockables doit être fondamentalement repensé. Il faut stopper ce projet basé sur des hypothèses de départ intrinsèquement dangereuses, se donner le temps de reprendre à la base la réflexion sur la gestion des déchets radioactifs déjà existants, et, pour cela, arrêter au plus vite de produire de nouveaux déchets, car il n'y aura pas de risque zéro dans la gestion de tels poisons.
13/09/2017 11:09
Avis sur Cigéo
Cette consultation pose encore, à nouveau, le problème du fonctionnement démocratique de notre société française qui n'a pas évoluée depuis 200 ans!
Quand nous savons que la décision dépend de ceux qui ont choisi cet enfouissement, toute réaction contraire est condamnée à finir dans les limbes.
Un petit progrès en la matière consisterait , de la part des "décideurs", à apporter des réponses précises à tous les arguments anti-projet, qu'ils soient techniques, qu'ils concernent le choix de l'enfouissement par rapport à d'autres solutions ou même-et ce n'est pas le moins important, qu'ils soient psychologiques : si je dis "j'ai peur!", ce sentiment ne doit pas être balayé d'un revers de main.
Mais obtiendrons-nous de la part de nos "décideurs" des réponses suffisamment approfondies et réfléchies, montrant ainsi que l'on est attentif aux expressions plurielles développées ou se contentera-t-on, comme d'habitude, d'écarter toute question trop incisive?
Ce serait déjà une bonne chose s'ILS prennent en compte la première partie de ma demande et apportent toute l'attention nécessaire.
Jean Reynaud
12/09/2017 23:09
Cigeo
Premièrement, les populations de Haute-Marne et Meuse aimeraient être consultées pour de vrai
2- comment comprendre que le Président du conseil Départemental, principal bénéficiaires des millions de CIGEO et membre important du comité d'évaluation technologique
3 Que comptez-vous faire de l'hydrogène radioactif ? si vous le rejetez vous polluez tous les départements voisins. si vous le gardez confiné (ou si les souffleries tombent en panne -possible malgré les redondances- )...BOUM
Ce dossier comporte beaucoup (beaucoup trop) de zones d'ombre et multiplie les risques (transports,...)
12/09/2017 18:09
CIGEO
Les Russes font tourner un RNR avec succès depuis 1980 - un second plus performant a démarré en 2015.
La France y parviendra. Dès ce moment le recyclage des déchets sera possible. Donc les enfouir compliquera leur récupération.
Sommaire de la consultation
- Introduction
- Modalités de la consultation
- Documents à consulter
- Les contributions des internautes
- Que permet le module de participation du public ?
- Quelles sont ses fonctionnalités ?
- Pourquoi créer un compte sur le site de l'ASN ?
- Confidentialité
Date de la dernière mise à jour : 10/06/2024