Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2021
Communiqué de presse
L’ASN a présenté le 17 mai, aux parlementaires de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), son rapport sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2021. Ce rapport a été transmis aux cabinets du président de la République et du Premier ministre et des présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale.
L’ASN demande que les préoccupations de sûreté nucléaire soient placées au cœur des décisions de politique énergétique
En 2021, la sûreté des installations nucléaires ainsi que la radioprotection dans les secteurs médicaux, industriels et des transports de substances radioactives se sont maintenues à un niveau satisfaisant, en grande continuité par rapport au niveau constaté en 2020.
Dans le domaine nucléaire, l’année a été particulièrement chargée pour EDF en matière d’activités industrielles, après une année 2020 perturbée par la crise sanitaire. Pour autant, l’ASN considère que la qualité d’exploitation des installations d’EDF s’est maintenue à un niveau satisfaisant et des progrès ont été constatés en matière de radioprotection après deux années de recul. Les travaux d’achèvement de l’EPR de Flamanville ont notablement avancé. En amont de l’autorisation de mise en service du réacteur, un travail important reste encore à mener sur de nombreuses thématiques identifiées depuis plusieurs années présentant des enjeux de sûreté importants. Par ailleurs, EDF devra tirer le retour d’expérience acquis sur les EPR mis en service en Finlande et en Chine, et en particulier sur les anomalies combustibles affectant le cœur du réacteur de Taishan. Chez EDF, la fin de l’année 2021 a été marquée par la découverte inattendue de fissures de corrosion sous contrainte sur des circuits raccordés aux tuyauteries principales du circuit primaire de plusieurs réacteurs. Il s’agit d’un événement sérieux dont la stratégie de traitement est en cours d’examen par l’ASN.
Le niveau de sûreté des installations exploitées par Orano est demeuré à un niveau globalement satisfaisant en 2021 avec des avancées dans la gestion des projets complexes tels que les opérations de reprise et de conditionnement des déchets radioactifs anciens. Ces avancées restent à généraliser et consolider pour l’ensemble des projets sensibles. Les dysfonctionnements de l’usine Mélox entrainent une saturation plus rapide que prévue des capacités d’entreposage des matières plutonifères, qui appelle en 2022 des actions urgentes de la part de l’exploitant
La sûreté des installations exploitées par le CEA est restée au niveau constaté en 2020. Le CEA doit clarifier sa vision quant à la poursuite du fonctionnement de certaines installations anciennes. Il doit également renforcer sa maîtrise des projets, notamment ceux concernant le démantèlement des installations définitivement arrêtées ou la reprise et le conditionnement de déchets anciens.
De manière générale, l’ensemble des exploitants nucléaires doivent encore progresser en matière de maîtrise du risque d’incendie, d’organisation et de moyens de gestion de crise et dans le contrôle de la conformité de leurs installations au regard des phénomènes de vieillissement, de dégradation et de corrosion des équipements qui tendent à s’amplifier.
Les travaux d’élaboration du plan national de gestion des matières et déchets radioactifs (PNGMDR) 2021‑2025 sont arrivés à leur terme. L’ASN estime que le projet de plan répond à l’objectif majeur de permettre que les décisions nécessaires soient prises avant son terme afin que des filières de gestion sûres soient opérationnelles, dans les 15 à 20 ans à venir, pour tous les types de déchets radioactifs. Elle considère cependant qu’une attention particulière doit être apportée au respect des échéances pour chacune des actions prévue par le futur PNGMDR.
Enfin, concernant le contrôle du domaine médical, l’ASN considère que malgré l’impact de la pandémie de Covid-19 sur le fonctionnement des services de santé, l’état de la radioprotection en 2021 est comparable à celui des années 2019 et 2020.
Ce qui ressort plus particulièrement de l’année 2021, et notamment de sa seconde partie, ce sont les fragilités industrielles qui touchent l’ensemble des installations nucléaires et le débat qui s’est installé sur les choix de politique énergétique et la place du nucléaire dans ces choix.
Dans ce contexte, à l’occasion de cette présentation du rapport à l’OPECST, le Président M. Doroszczuk a partagé avec les parlementaires quatre convictions :
- Le système électrique français doit aujourd’hui faire face à une double fragilité inédite en matière de disponibilité qui touche tant les installations du « cycle du combustible » que le parc nucléaire des réacteurs. Ces fragilités, qui résultent pour l’essentiel de l’absence de marge et d’un déficit d’anticipation, doivent servir de retour d’expérience pour l’ensemble de la filière nucléaire et les pouvoirs publics.
- Les préoccupations de sûreté nucléaire doivent être placées au cœur des décisions de politique énergétique, au même niveau que les préoccupations de production d’électricité décarbonée à horizon 2050. Dans les 5 ans qui viennent, EDF devra questionner et justifier individuellement la capacité des réacteurs les plus anciens à poursuivre leur fonctionnement au‑delà de 50 ans, voire de 60 ans, et d’ici la fin de la décennie au plus tard, le Gouvernement devrait se prononcer sur la poursuite ou non du retraitement des combustibles usés à l’horizon de 2040.
- La perspective d’une politique énergétique comportant une composante nucléaire de long terme doit être accompagnée d’une politique exemplaire en matière de gestion des déchets et du nucléaire historique. Une telle politique suppose que des décisions soient prises pour que tous les types de déchets disposent de filières de gestion opérationnelles, et que les exploitants nucléaires se mobilisent davantage pour conduire, dans les délais prévus, les projets de reprise et de conditionnement sûr des déchets nucléaires historiques dont ils ont la responsabilité.
- Les nouvelles perspectives de politique énergétique, quelles qu’elles soient, supposent un effort industriel considérable pour faire face aux enjeux industriels et de sûreté. Si le nucléaire fait partie des choix faits pour assurer un mix énergétique décarboné à horizon 2050, la filière nucléaire devra mettre en place un véritable « plan Marshall » pour rendre industriellement soutenable cette perspective, et disposer des compétences lui permettant de faire face à l’ampleur des projets et à leur durée.
Lors de cette présentation, les échanges avec les parlementaires ont notamment porté sur :
- Le phénomène de corrosion sous contrainte et les problématiques liées au vieillissement des installations ;
- La gestion des déchets et la capacité d’entreposage ;
- L’incidence du réchauffement climatique sur le bon fonctionnement des centrales nucléaires ;
- Le rôle de l’ASN et le renforcement de son indépendance ;
- Le renforcement des compétences de la filière nucléaire.
A consulter dans le Rapport de l’ASN
Contact presse :
Evangelia Petit, cheffe du pôle presse de l’ASN : 01 46 16 41 42, evangelia.petit@asn.fr
Date de la dernière mise à jour : 20/01/2023