Phénomène de colmatage des puisards de recirculation des circuits RIS-EAS des centrales nucléaires
Note d'information
Des études menées au plan international et des travaux de recherche récemment conduits en France par l'IRSN ont soulevé des interrogations sur la défaillance potentielle de la fonction de recirculation des réacteurs nucléaires à eau sous pression, en conditions accidentelles, du fait d'une possibilité de colmatage des filtres des puisards situés au fond du bâtiment du réacteur.
L'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a de ce fait demandé à Electricité de France, dans un courrier daté du 9 octobre 2003, d'examiner cette question en priorité pour tous les modèles de réacteurs français, et de prendre position avant la fin de l'année 2003 sur le phénomène de colmatage des filtres des puisards.
Dans sa réponse du 24 décembre 2003, EDF indique que, dans certaines situations accidentelles très improbables (rupture complète d'une tuyauterie du circuit primaire), le colmatage des filtres des puisards ne peut être exclu, mais qu'il peut être écarté pour des brèches moins importantes. Des modifications matérielles des installations sont en cours d'étude afin de remédier à l'anomalie. En parallèle, EDF analyse différentes mesures visant à limiter, dans l'attente de la mise en oeuvre des modifications, l'impact de l'anomalie en situation accidentelle.
Compte tenu de son impact potentiel sur la sûreté des installations, cet évènement a été classé au niveau 2 de l'échelle INES.
1. Le rôle de la fonction de recirculation et l'importance des puisards
En cas d'accident de rupture de tuyauterie à l'intérieur du bâtiment du réacteur, les systèmes d'injection d'eau de sécurité (RIS) et d'aspersion d'eau dans l'enceinte (EAS) sont mis en service automatiquement. L'injection d'eau dans le circuit primaire a notamment pour but de continuer à refroidir le coeur du réacteur (combustible nucléaire). L'aspersion dans l'enceinte a pour objectif de diminuer la pression et la température dans l'enceinte de confinement. L'eau injectée par les systèmes RIS et EAS est tout d'abord pompée dans un réservoir. Lorsque ce réservoir est vide, l'eau issue de la fuite et de l'aspersion est collectée dans les puisards situés au fond du bâtiment du réacteur avant d'être réinjectée par les systèmes RIS et EAS grâce au dispositif de recirculation.
Fonction de recirculation d'un réacteur nucléaire à eau sous pression
Les débris générés au niveau de la brèche (particules de calorifuges, de béton ou de peinture) sont susceptibles d'atteindre les grilles filtrantes des puisards RIS et EAS, compte tenu des écoulements de l'eau dans le bâtiment du réacteur. Ces grilles ont été conçues pour empêcher le passage de débris susceptibles d'endommager les systèmes de sûreté, sans elles-mêmes être colmatées par ces débris.
2. L'apport des nouvelles connaissances sur le phénomène de colmatage des puisards
En 1992, le colmatage partiel des filtres d'une piscine de condensation a été observé lors d'un incident, sans conséquence grave sur la sûreté, survenu à la centrale nucléaire suédoise de Barsebäck sur un réacteur nucléaire à eau bouillante, d'une technologie différente de celle des réacteurs à eau sous pression.
Des études sur le phénomène de colmatage des puisards ont alors été menées en priorité sur les réacteurs à eau bouillante et ont conduit les exploitants à procéder à des modifications matérielles. Les analyses menées par la suite sur les réacteurs de technologie différente, dont les réacteurs à eau sous pression, n'avaient pas conclu, pour les réacteurs français, à l'existence d'une anomalie.
Cependant, de nouvelles études réalisées au plan international et les premiers résultats en 2003 du programme expérimental de recherche lancé en 1997 par l'IRSN sur les phénomènes de colmatage, pour le cas des réacteurs français, ont amené à s'interroger sur la pertinence des règles d'étude utilisées pour la conception des systèmes de filtration.
3. Les actions engagées et les perspectives
L'ASN a demandé à EDF, dans un courrier daté du 9 octobre 2003, d'étudier le phénomène de colmatage des filtres des puisards en situation accidentelle et de prendre position avant la fin de l'année 2003 sur le risque de perte de la fonction recirculation induit par ce phénomène, et ce pour tous les modèles de réacteurs français.
Dans sa réponse datée du 24 décembre 2003, EDF indique que, dans certaines situations accidentelles très improbables (rupture complète d'une tuyauterie du circuit primaire), le colmatage des filtres des puisards ne peut être exclu, mais qu'il peut être écarté pour des brèches moins importantes. Tous les réacteurs nucléaires français sont concernés à divers degrés, les plus anciens apparaissant les plus sensibles à ce phénomène, car ils disposent de surfaces de filtration plus faibles.
Des modifications matérielles des installations sont en cours d'étude afin de remédier à l'anomalie, avec l'objectif d'une mise en oeuvre à partir de 2005. En parallèle, EDF analyse différentes mesures visant à limiter, dans l'attente de la mise en oeuvre des modifications, l'impact de l'anomalie en situation accidentelle (renforcement mécanique des filtres, remplacement du calorifuge dans certaines zones, mise en place de chicanes ou de pré-filtres sur le cheminement des débris, adaptation de la conduite accidentelle).
L'ASN va à présent examiner, avec l'appui de l'IRSN, les éléments techniques fournis par l'exploitant et les mesures qu'il propose pour remédier à l'anomalie.
Date de la dernière mise à jour : 03/09/2021