Rapport de l'ASN 2020

La déconstruction des structures et du génie civil, s’il y a lieu, peut être réalisée de manière conventionnelle après leur assainissement complet. Néanmoins, dans certains cas de structures très contaminées, il est nécessaire de réaliser cette déconstruction au cours des étapes du démantèlement, leur stabilité ne pouvant plus être garantie une fois qu’elles sont assainies. Dans ce cas, la déconstruction, réalisée avec les techniques spécifiques du nucléaire, est une étape nécessaire au déclassement. Ces installations très anciennes sont toutes confrontées à la problématique de gestion des déchets dits «historiques », entreposés sur place à une époque où les filières de gestion n’avaient pas été mises en place : déchets nucléaires de moyenne activité à vie longue (MA-VL), déchets sans filière (par exemple : amiante, mercure, etc.). Par ailleurs, des incidents ont eu lieu lors de leur exploitation, contribuant à l’émission de substances radioactives à l’intérieur et à l’extérieur des enceintes de confinement et à des pollutions plus ou moins importantes des structures et des sols, ce qui rend les démantèlements difficiles et longs. Une des étapes les plus importantes – et parfois difficile du fait d’archives incomplètes – du démantèlement de ce type d’installation, consiste à établir le plus précisément possible l’inventaire des déchets et l’état radiologique de l’installation pour définir les étapes du démantèlement et les filières de gestion des déchets. En effet, des états initiaux incomplets et une caractérisation des déchets insuffisante conduisent à devoir réviser les étapes prévues et à des difficultés de conditionnement des déchets, préjudiciables à l’avancement du démantèlement. Lorsque les déchets sont évacués, très souvent dans des entreposages intermédiaires, et les principaux équipements démontés à distance avec les moyens de manutention existants, il est le plus souvent nécessaire, pour poursuivre les travaux de démantèlement, d’ouvrir les barrières de confinement des substances radioactives afin d’éliminer les derniers équipements de procédé ou de recherche, ainsi que les tuyauteries, en utilisant, entre autres, des moyens de découpe et des moyens de manutention plus importants. Ces derniers présentent des risques et peuvent conduire à une dissémination de la matière radioactive, source potentielle de contamination interne et externe pour les intervenants qui opèrent au plus près et doivent être protégés. Ces travaux peuvent en outre être réalisés à proximité de sources de rayonnements qui induisent des risques d’exposition externe pour les intervenants. 2.2.2 Les réacteurs de recherche À la fin de l’année 2020, neuf réacteurs expérimentaux sont définitivement arrêtés : Rapsodie (réacteur à neutrons rapides refroidi au sodium), Masurca (maquette critique), Phébus (réacteur d’essai), Osiris et Orphée (réacteurs de type «piscine »), Éole et Minerve (maquettes critiques), Ulysse et Isis (réacteurs d’enseignement). Tous sont en phase de préparation au démantèlement, sauf Ulysse, dont les opérations de démantèlement se sont achevées en août 2019. Ces réacteurs sont caractérisés par une puissance plus faible (de 100 watts thermiques à 70 mégawatts thermiques – MWth) que pour les réacteurs électronucléaires. Leur démantèlement n’avait pas été anticipé au moment de leur conception, dans les années 1960 à 1980. Par ailleurs, l’une des problématiques majeures du démantèlement est la mémoire de la conception et de l’exploitation de l’installation. Ainsi, le maintien de compétences et la phase de caractérisation de l’installation visant à définir son état initial (état de l’installation au début du démantèlement) présentent une importance cruciale. Au moment du démantèlement, ces installations présentent généralement un 4. Triton fut l’un des premiers réacteurs de recherche très compacts et très souples, de type piscine, dénommés « MTR » (Material Test Reactor). Triton (6,5 MWth) fut implanté en 1959, à Fontenay‑aux‑Roses. faible terme source radiologique, puisque l’une des premières opérations consiste à évacuer le combustible usé lors des opérations préparatoires au démantèlement. Les opérations de démantèlement d’un réacteur de recherche entraînent des risques évoluant rapidement du fait des nombreuses modifications de l’installation : peu à peu, les risques nucléaires laissent place aux risques industriels conventionnels, tels que le risque lié à la gestion de plusieurs chantiers simultanés, ou encore le risque chimique lors de la phase d’assainissement. L’un des principaux enjeux réside cependant dans la production importante de déchets TFA et dans leur gestion, afin d’assurer leur entreposage puis leur élimination par une filière appropriée. Les réacteurs de recherche bénéficient d’un retour d’expérience significatif, lié au démantèlement de nombreuses installations similaires en France (Siloé, Siloette, Mélusine, Harmonie, Triton(4), le réacteur universitaire de Strasbourg – RUS) et à l’international. Leur démantèlement se fait habituellement sur des durées de l’ordre de la dizaine d’années. La majorité de ces réacteurs a été démolie en filière conventionnelle après assainissement. 2.3  Les installations de l’amont du «cycle du combustible nucléaire» Deux installations de l’amont du « cycle du combustible » en exploitation sont en démantèlement. Elles sont situées sur le site du Tricastin, l’une spécialisée dans l’enrichissement de l’uranium par diffusion gazeuse (INB 93), l’autre dans la conversion de l’uranium (INB 105). Les matières radioactives mises en œuvre lors du fonctionnement de ces usines étaient uniquement des substances uranifères. Une des spécificités de ces installations réside dans la présence de contamination radioactive liée à la présence d’isotopes de l’uranium, émetteurs de particule « alpha ». Les enjeux de radioprotection sont donc en grande partie liés au risque de contamination interne. Par ailleurs, ces installations sont également des installations anciennes, dont l’historique de fonctionnement est mal connu. La détermination de l’état initial, et notamment des pollutions présentes dans les sols sous les structures, demeure donc un enjeu important. De plus, les procédés industriels mis en œuvre à l’époque impliquaient l’utilisation de substances chimiques toxiques en quantités importantes (uranium, trifluorure de chlore ou fluorure d’hydrogène, par exemple) : le confinement de ces substances chimiques représente donc également un enjeu sur ces installations. 2.4  Les installations de l’aval du «cycle du combustible nucléaire» Les installations civiles de l’aval du « cycle du combustible » sont constituées des piscines d’entreposage des combustibles usés, des usines de traitement des combustibles usés et des entreposages des déchets du procédé de traitement. Ces installations, exploitées par Orano, sont situées sur le site de La Hague. La première installation de traitement de La Hague a été mise en service en 1966, initialement pour le traitement du combustible des réacteurs de première génération UNGG. Cette installation, l’INB 33, dénommée UP2‑400, pour « unité de production 2‑400 tonnes » (la première usine de traitement aujourd’hui en démantèlement est UP1, située dans l’INBS de Marcoule), a été définitivement arrêtée le 1er janvier 2004 avec ses ateliers supports : la station de traitement des effluents STE2 et l’atelier de traitement des combustibles usés AT1 (INB 38), l’atelier Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2020 349 13 – LE DÉMANTÈLEMENT DES INSTALLATIONS NUCLÉAIRES DE BASE 13

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