Rapport de l'ASN 2018
Enfin, l’ASN relevait que la prise en compte des modifications des installations, issues notamment des études complémentaires de sûreté ou des travaux de poursuite d’exploitation (réexamens périodiques et « grand carénage » d’EDF), n’était généralement pas explicite. Les exploitants actualisent annuellement ces évaluations. Comme en 2017, l’ASN a relevé en 2018 le manque de détail des informations fournies par EDF et la nécessité d’évaluer l’impact de l’indisponibilité d’installations requises pour le démantèlement à la date envisagée. L’ASN a noté également que les démarches d’assainissement des structures et de gestion des sols pollués présentées ont peu évolué depuis les rapports triennaux remis en 2016. Enfin, l’ASN estime que les exploitants doivent compléter l’évaluation des charges en prenant en compte les opérations de préparation au démantèlement. 4 — Évaluation de la sûreté nucléaire des installations en démantèlement 4.1 ̶ Les stratégies de démantèlement des exploitants Dans un contexte où de nombreuses installations sont arrêtées depuis plusieurs décennies, avec une connaissance de l’instal lation et de son historique d’exploitation partiellement perdue, des structures vieillissantes et parfois une quantité importante de déchets encore présente, l’avancement des projets de déman tèlement fait partie des enjeux majeurs pour la sûreté des ins tallations arrêtées. Or l’ASN a constaté que la plupart des pro jets de démantèlement prenait des retards importants. L’ASN demande donc au CEA, EDF et Orano de présenter périodique ment leur stratégie de démantèlement et de gestion des déchets radioactifs, ce qui permet de disposer d’une vision intégrée des projets de démantèlement, et des exutoires disponibles ou à créer pour l’évacuation des déchets produits pendant les opé rations de démantèlement. En ce qui concerne le démantèlement, les exploitants doivent notamment justifier, principalement par des analyses de sûreté, les opérations prioritaires. Cette hiérarchisation permet de contrôler que, même si certains projets connaissent des retards conséquents, les moyens les plus importants seront consacrés aux opérations à plus fort enjeu. En ce qui concerne la gestion des déchets radioactifs, l’ASN vérifie la cohérence avec le cadre réglementaire et les orienta tions du Plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs ( PNGMDR ) . L’ASN examine tout particulièrement les parades en cas d’aléas sur une installation de gestion des déchets et la crédibilité des échéances annoncés par les exploi tants. Elle s’assure que les exploitants anticipent les études de sûreté des colis et de faisabilité des procédés de conditionne ment. L’ASN contrôle également la disponibilité des filières de déchets envisagées ainsi que des moyens support (emballages de transport, installations de traitement et d’entreposage…) qui conditionnent en pratique la pérennité de la stratégie de démantèlement. L’ASN prendra position en 2019 sur les dossiers de stratégie de démantèlement et de gestion des déchets du CEA et d’Orano ainsi que sur le dossier de justification du changement de stratégie de démantèlement des réacteurs UNGG d’EDF. Le contexte et les premières conclusions des instructions menées sont détaillés ci‑après. 4.1.1 – Évaluation de la stratégie de démantèlement d’EDF La première stratégie de démantèlement des réacteurs défini tivement à l’arrêt d’EDF a été transmise en 2001 à la demande de l’ASN. Cette stratégie a été régulièrement mise à jour, afin notamment d’ajuster le calendrier de démantèlement, d’y inté grer les études complémentaires demandées par l’ASN et des éléments relatifs au démantèlement futur du parc des réac teurs en fonctionnement. Ces mises à jour ne remettaient en cause ni les scénarios de démantèlement ni le cadencement des démantèlements. Pour les réacteurs de première génération de type UNGG, EDF a annoncé à l’ASN, en mars 2016, un changement com plet de stratégie (passage à un démantèlement « en air » et non plus « sous eau » ; modification du premier réacteur démantelé Chinon A2 au lieu de Bugey 1), qui conduit à retarder leur démantèlement de plusieurs décennies. Cette stratégie repose maintenant sur l’exploitation d’un démonstrateur industriel pendant une dizaine d’années pour qualifier le procédé de démantèlement du caisson des réacteurs. Une fois la qualifica tion acquise, EDF propose de réaliser le démantèlement com plet du caisson d’un premier réacteur (Chinon A2) avant d’en tamer le démantèlement des caissons des cinq autres réacteurs. En juin 2016, l’ASN a auditionné EDF sur cette stratégie et a demandé que des dossiers de justification de ce changement de stratégie lui soient transmis. L’ASN a reçu ces compléments en mars 2017 et décembre 2017. Ces dossiers ont fait l’objet d’un dialogue technique important entre EDF et l’ASN. L’ASN a par ailleurs inspecté, en décembre 2017, l’organisation et la prise en compte de la sûreté et de la radioprotection dans les études et la stratégie de démantèlement. Cette inspection montre que le processus d’appel d’offres pour concevoir les études de déman tèlement « sous eau » de Bugey a été rigoureux et prenait bien en compte la sûreté et la radioprotection. Les inspecteurs ont constaté que la décision de changement de stratégie semble avoir été prise pour des raisons de partage des risques indus triels avec les éventuels prestataires, et des raisons financières. L’ASN estime que l’attente du démantèlement complet d’un réacteur avant de commencer tous les autres, conduisant à reporter le démantèlement de ces réacteurs de plusieurs décen nies, n’est pas acceptable et a demandé à EDF d’étudier des pistes de possible optimisation du calendrier de démantèlement des UNGG. 4.1.2 – Évaluation de la stratégie de démantèlement d’Orano Le démantèlement d’installations anciennes constitue un enjeu majeur pour Orano, qui doit mener, à court, moyen et long termes, plusieurs projets de démantèlement de grande enver gure (usine UP2‑400 de La Hague, usine Eurodif Production, installations individuelles de l’INBS de Pierrelatte…). La mise en œuvre du démantèlement est étroitement liée à la stratégie de gestion des déchets radioactifs, compte tenu de la quantité et du caractère non standard et difficilement caractérisable des déchets produits lors des opérations de démantèlement. Par ailleurs, Orano doit réaliser, dans des installations anciennes d’entreposage, des opérations particulières de reprise et conditionnement des déchets anciens (RCD). Des échéances de réalisation ont été prescrites par l’ASN, en particulier pour le site de La Hague. La réalisation de ces opérations RCD Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2018 345 13 – LE DÉMANTÈLEMENT DES INSTALLATIONS NUCLÉAIRES DE BASE 13
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