Rapport de l'ASN 2018

L’ASN contrôle régulièrement les processus d’élaboration et de validation des règles de conduite en cas d’incident ou d’acci‑ dent, leur pertinence et leurs modalités de mise en œuvre. Dans ce cadre, l’ASN peut mettre en situation les équipes de conduite de l’installation pour contrôler les modalités d’application des règles précitées et de gestion des matériels spécifiques utilisés en conduite accidentelle. Elle veille en par‑ ticulier à la bonne application des principes d’organisation des équipes de crise décrits dans le référentiel d’EDF validé par l’ASN. Cette organisation prévoit notamment que chaque équi‑ pier de crise participe au moins annuellement à un exercice. La conduite en cas d’accident grave À la suite d’un incident ou d’un accident, si les fonctions de sûreté (maîtrise de la réactivité, du refroidissement et du confi‑ nement) ne sont pas assurées du fait d’une succession de défail‑ lances, la situation est susceptible d’évoluer vers un accident grave consécutivement à un endommagement sévère du com‑ bustible. Face à de telles situations, peu probables, les straté‑ gies de conduite de l’installation privilégient la préservation de l’enceinte de confinement afin de limiter autant que possible les rejets dans l’environnement (voir chapitre 4, point 1.3.1). La mise en œuvre de ces stratégies mobilise les compétences des équipes de crise constituées au niveau local et au niveau natio‑ nal. Ces équipes s’appuient sur le plan d’urgence interne (PUI), complété notamment du guide d’intervention en cas d’accident grave et des guides d’action des équipes de crise. L’ASN examine périodiquement les stratégies développées par EDF dans ces documents, en particulier dans le cadre des réexa‑ mens périodiques des réacteurs. 2.4.2  –  L’évaluation de l’exploitation des réacteurs • Le fonctionnement normal et dégradé L’année 2018 a été marquée par des difficultés rencontrées par EDF dans la maîtrise des activités de conduite et de mainte‑ nance, en particulier lors des redémarrages après les arrêts de réacteur. L’ASN ne constate pas d’amélioration notable de la qualité de l’exploitation des centrales nucléaires par rapport à l’année 2017 dans la mesure où les causes profondes des défauts apparaissent structurelles et où les effets des actions engagées par EDF ne sont pas encore mesurables. La maîtrise de certaines activités sensibles, telles que les modi‑ fications momentanées des configurations des circuits pour procéder aux essais périodiques de certains matériels, à l’ori‑ gine de non‑qualités d’exploitation, semble en voie de progrès sur certains sites. Ces progrès, qui sont à replacer dans le cadre des plans d’action engagés par EDF depuis plusieurs années, restent à conforter. En revanche, le traitement des alarmes en salle de com‑ mande – de leur prise en compte par l’équipe de conduite à la réalisation des actions de conduite requises par les fiches d’alarme – est en retrait. L’ASN note en particulier une accou‑ tumance aux alarmes récurrentes, ce qui est particulièrement préjudiciable puisqu’une même alarme peut signaler des défail‑ lances différentes. Des défauts de qualité de maintenance sont régulièrement à l’origine d’une augmentation de la durée des phases de redémarrage des réacteurs après leur arrêt pour renouvellement du combustible. Les activités récurrentes, telles que la réalisation d’essais périodiques, ont été par ailleurs à l’origine d’écarts en phase de préparation comme en phase de réalisation. L’appropriation, par les acteurs concernés, des pratiques de fiabilisation des interventions reste insuffisante. Cette situation conduit l’ASN à reconduire le dispositif de contrôle adapté mis en œuvre en 2018. Il se traduit notamment par des inspections renforcées sur les sites les plus en retrait. L’ASN constate par ailleurs que les processus qu’EDF met en œuvre pour la conception des spécifications techniques d’exploitation et des règles d’essais périodiques soumises à son autorisation ont été défaillants à plusieurs reprises. EDF a notamment dû réviser les règles générales d’exploitation des réacteurs de 1 300 MWe appliquées à l’issue de leur troisième visite décennale pour assurer la cohérence entre l’état réel des installations et les documents d’exploitation. Les contrôles ren‑ forcés que l’ASN a réalisés en 2018 ont conduit EDF à engager une révision en profondeur de ses processus de conception de la documentation utilisée pour assurer le maintien du fonctionne‑ ment des réacteurs dans le périmètre couvert par leur démons‑ tration de sûreté nucléaire. La planification, la réalisation et l’analyse des résultats des essais périodiques constituent des domaines dans lesquels la quasi‑totalité des sites doit progresser. Cette constatation est faite de manière récurrente pour de nombreux sites. Les gammes renseignées d’essais périodiques sont des docu‑ ments régulièrement contrôlés par les inspecteurs de l’ASN. L’ASN constate que le manque de préparation des essais pério‑ diques conduit parfois à des dépassements de périodicité de réalisation et à ce que les conditions de réalisation de ces essais soient inadéquates. L’autre raison expliquant les retards de réa‑ lisation d’essais est la mise en œuvre du nouveau système infor‑ matique des centrales, dans lequel la transposition de certains essais périodiques a parfois été mal réalisée. Par ailleurs, les ins‑ pecteurs de l’ASN ont constaté à plusieurs reprises des conclu‑ sions erronées en matière de disponibilité des matériels à l’issue de la réalisation d’essais périodiques. L’ASN constate aussi que les sites éprouvent des difficultés à traduire les exigences por‑ tées par les règles d’essais périodiques dans les gammes d’es‑ sais opératoires. L’ensemble de ces situations a fait l’objet de nombreux événements significatifs pour la sûreté. Un événe‑ ment significatif pour la sûreté concernant l’absence de suivi métrologique de capteurs utilisés pour la validation de critères de sûreté lors des essais périodiques a particulièrement retenu l’attention de l’ASN, qui a veillé à ce que les sites mettent à jour le suivi métrologique des capteurs et que ceux‑ci justifient de la disponibilité des matériels ayant fait l’objet d’essais avec des capteurs non suivis. Par ailleurs, l’ASN a constaté des défauts de contrôle récurrents lors des essais physiques du cœur réalisés au redémarrage des réacteurs et durant l’exploitation. Ces anomalies concernent en particulier les essais de mesures de temps de chute des grappes et compromettent la détection d’éventuels écarts relatifs à la maîtrise de la réactivité. De plus, l’ASN considère nécessaire de renforcer l’exploitation des signaux faibles relatifs aux indispo‑ nibilités des matériels valorisés lors des accidents de dilution du réfrigérant primaire. Comme en 2017, l’ASN constate, en 2018, que le taux de suivi des avis exprimés par la filière indépendante de sûreté (FIS), présente au sein de chaque entité d’EDF, varie de manière significative d’une centrale nucléaire à l’autre. L’ASN a en par‑ ticulier constaté que les processus de prise de décision d’EDF, qui mobilisent notamment la FIS, ne permettent pas toujours d’assurer que la priorité est accordée à la protection des intérêts. • La conduite en cas d’incident, d’accident ou d’accident grave Comme chaque année, l’ASN a mené en 2018 plusieurs inspec‑ tions sur les dispositions organisationnelles et techniques pré‑ vues par EDF en situation d’incident et d’accident. L’une d’elles a été réalisée de manière réactive après un dysfonctionnement 286  Rapport de l’ASN sur l’état de la sûreté nucléaire et de la radioprotection en France en 2018 10 – LES CENTRALES NUCLÉAIRES D’EDF

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